J’étais enfant, peut-être sept ou huit ans, quand j’entendis, pour la première fois, mon grand-père Auguste parler de l’hiver du Ponchon. Je me rappelle que je lui avais alors demandé : « c’est quoi l’hiver du Ponchon ? » Il m’avait répondu que c’était l’hiver où ils avaient été bien mal pris. C’est plusieurs années plus tard que je lui ai demandé s’il pouvait me la raconter cette histoire….
C’était en 1910…la glace avait pris de bonne heure dans le golfe…le bateau n’avait pas pu faire son dernier voyage avec les provisions pour l’hiver. ..on avait du poisson salé en quantité, des patates pis des légumes mais la farine, le sucre et le thé commençaient à se faire rare….ça fait qu’on forçait sur le hareng salé…on en mangeait quasiment trois fois par jour….on se demandait ben comment on allait passer l’hiver….au mois de janvier, le 6 janvier, ça été le pire du pire….par une grosse tempête, le câble pour le télégraphe, qui passait dans le golfe entre les Îles et le Cap Br’ton, s’est brisé…..., cette fois là, on a cru que la Sainte Vierge nous avait abandonné…là, on était vraiment isolé, perdu dans le golfe, avec aucun moyen pour r’joindre la grand’terre….
Des jeunesses comme moi…on a commencé à penser à prendre la mer…pour aller quelque part à l’est…en Nouvelle-Écosse…au Cap Br’ton…chercher du secours….mais les vieux disaient que c’était pas faisable, que les havres étaient gelés, que la glace était traître…qu’on allait périr….Tous les jours, on en parlait, on allait à la dune sur les butreaux pour voir la mer, puis au revenait sur la Grave, au magasin à Jos Thellab… c’est là qu’un après-midi quelqu’un a eu une idée…si, au lieu de prendre la mer, nous autres mêmes, on gréait un baril de mélasse comme une embarcation… avec une voile pis un gouvernail en fer…pis qu’on lançait ça à la mer, une journée de vent du nordet…on a pensé que ça pourrait accoster quelque part en Nouvelle-Écosse…et que quelqu’un de par-là pourrait le trouver.
Les femmes se sont mises à l’ouvrage…elles ont fait une voile puis brodé dessus en grosses lettres Winter Magdalen Mail….après, celles qui étaient capables ont écrit des lettres, 27 sept lettres, pour la parenté, les députés, le ministre de la marine… les lettres ont été placées dans des boîtes de fer blanc cachetées à l’épreuve de l’eau….puis les boîtes dans le ponchon…. on était prêt à appareiller.
On s’est mis à surveiller le vent pis la glace dans le golfe…le 2 février, les vieux pêcheurs ont décidé que c’était bon…tout le monde s’est rendu à la dune sur le Bout du Banc…c’est là qu’on a lancé le Ponchon sur le Bout du Banc….en espérant que la Vierge Marie serait de notre bord.
Ben, le Ponchon a accosté, deux semaines plus tard, à l’île du Cap-Br’ton, à Port Hasting. Ceux de par-là l’ont ouvert et ça n’a pas été long que tout le monde était au courant de notre misère …dans les premiers jours de mars, on a aperçu de la fumée au large….tout le monde a pris pour la Grave….et ça criait «un bateau, un bateau» c’était le gouvernement qui nous envoyait du secours….un bateau à vapeur, le Harlow était parti de Sydney en Nouvelle- Écosse, le 1er mars pour mettre le cap sur les Îles.
C’était en 1910…la glace avait pris de bonne heure dans le golfe…le bateau n’avait pas pu faire son dernier voyage avec les provisions pour l’hiver. ..on avait du poisson salé en quantité, des patates pis des légumes mais la farine, le sucre et le thé commençaient à se faire rare….ça fait qu’on forçait sur le hareng salé…on en mangeait quasiment trois fois par jour….on se demandait ben comment on allait passer l’hiver….au mois de janvier, le 6 janvier, ça été le pire du pire….par une grosse tempête, le câble pour le télégraphe, qui passait dans le golfe entre les Îles et le Cap Br’ton, s’est brisé…..., cette fois là, on a cru que la Sainte Vierge nous avait abandonné…là, on était vraiment isolé, perdu dans le golfe, avec aucun moyen pour r’joindre la grand’terre….
Des jeunesses comme moi…on a commencé à penser à prendre la mer…pour aller quelque part à l’est…en Nouvelle-Écosse…au Cap Br’ton…chercher du secours….mais les vieux disaient que c’était pas faisable, que les havres étaient gelés, que la glace était traître…qu’on allait périr….Tous les jours, on en parlait, on allait à la dune sur les butreaux pour voir la mer, puis au revenait sur la Grave, au magasin à Jos Thellab… c’est là qu’un après-midi quelqu’un a eu une idée…si, au lieu de prendre la mer, nous autres mêmes, on gréait un baril de mélasse comme une embarcation… avec une voile pis un gouvernail en fer…pis qu’on lançait ça à la mer, une journée de vent du nordet…on a pensé que ça pourrait accoster quelque part en Nouvelle-Écosse…et que quelqu’un de par-là pourrait le trouver.
Les femmes se sont mises à l’ouvrage…elles ont fait une voile puis brodé dessus en grosses lettres Winter Magdalen Mail….après, celles qui étaient capables ont écrit des lettres, 27 sept lettres, pour la parenté, les députés, le ministre de la marine… les lettres ont été placées dans des boîtes de fer blanc cachetées à l’épreuve de l’eau….puis les boîtes dans le ponchon…. on était prêt à appareiller.
On s’est mis à surveiller le vent pis la glace dans le golfe…le 2 février, les vieux pêcheurs ont décidé que c’était bon…tout le monde s’est rendu à la dune sur le Bout du Banc…c’est là qu’on a lancé le Ponchon sur le Bout du Banc….en espérant que la Vierge Marie serait de notre bord.
Ben, le Ponchon a accosté, deux semaines plus tard, à l’île du Cap-Br’ton, à Port Hasting. Ceux de par-là l’ont ouvert et ça n’a pas été long que tout le monde était au courant de notre misère …dans les premiers jours de mars, on a aperçu de la fumée au large….tout le monde a pris pour la Grave….et ça criait «un bateau, un bateau» c’était le gouvernement qui nous envoyait du secours….un bateau à vapeur, le Harlow était parti de Sydney en Nouvelle- Écosse, le 1er mars pour mettre le cap sur les Îles.
C’est ainsi que mon grand-père avait vécu l’hiver du Ponchon. Toute sa vie, il s’en est rappelé…pour lui, c’était l’hiver de la misère et de l’inquiétude.
Dans les archives, on peut retrouver, quelques phrases écrites alors par une madelinienne: « Je confie ces lignes au hasard des flots….j’ai le cœur gonflé d’émotions….des larmes s’échappent malgré moi en traçant ces lignes qui doivent franchir les limites périlleuses qui nous séparent du reste des humains. L’appareil est prêt : un tonneau à voile, muni d’un gouvernail en fer pour qu’il accoste quelque part. Béni soit celui qui le premier volera au secours de notre frêle esquif !»
Mes ancêtres étaient aguerris à la mer; ils étaient ingénieux; ils avaient les connaissances de l'expérience et la sagesse de ceux qui savent prendre le temps d'observer la nature et de réfléchir; ils avaient foi en la Providence.
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